Le récit de Ruth se déroule pendant l’une des époques les plus sombres de l’histoire d’Israël, celle des juges. Le peuple venait de s’installer dans le pays promis et la monarchie n’était pas encore instaurée. Aucun gouvernement national n’exerçait d’autorité. Israël n’était qu’un ensemble de tribus. Les juges étaient en quelque sorte des chefs de clans, appelés à renverser les oppresseurs étrangers. Ils assuraient le commandement militaire de leur région, mais ne possédaient aucun pouvoir politique à l’échelle du pays.
Le livre des Juges décrit la spirale infernale dans laquelle Israël est entraîné aux niveaux national et spirituel. Il met l’accent sur le besoin d’un roi selon Dieu pour diriger son peuple (Juges 2.11-19). Un cycle d’événements ne cesse de se répéter: le peuple se rebelle contre Dieu; Dieu le livre aux mains de ses oppresseurs; le peuple se repent (tout au moins dans les premiers chapitres); Dieu envoie un libérateur pour accorder au peuple une période de repos. Le livre de Tim Keller, Juges pour toi, propose un graphique intéressant qui représente ces cycles. Les derniers chapitres de Juges (Juges 17-21) sortent de cette spirale infernale pour illustrer de manière plus précise comment la nation s’est totalement égarée. Elle ne vaut pas mieux que les nations païennes des alentours.
Nous ne savons pas exactement où se situe l’histoire de Ruth par rapport à la succession des juges. En revanche, il est évident que l’auteur de ce livre considère que cette période fait partie du passé. La façon dont certaines coutumes sont expliquées sous-entend que le livre a été rédigé longtemps après que les faits se sont produits (par exemple, Ruth 4.7). Ruth a été écrit soit à l’époque de la monarchie en Israël, soit après l’exil. Il revient sur une période révolue. Nous pouvons donc considérer le temps des juges comme la toile de fond de l’histoire de Ruth.
En ce temps-là régnaient la violence, l’idolâtrie, la dépravation morale et la guerre civile. La phrase suivante est répétée plusieurs fois dans le livre des Juges et c’est d’ailleurs elle qui conclut le livre: «À cette époque-là, il n’y avait pas de roi en Israël. Chacun faisait ce qui lui semblait bon» (Juges 21.25; voir aussi 17.6; 18.1; 19.1). Sur cette sombre toile de fond, Boaz et Ruth se détachent telles de brillantes étoiles. Il est surprenant de trouver de tels exemples de piété en ce temps-là! La providence de Dieu apparaît, elle aussi, de manière éclatante dans cette période obscure. Malgré le péché et la rébellion, Dieu continue de réaliser son plan de rédemption.
L’expression «chacun faisait ce qui lui semblait bon» (Juges 21.25) ne s’applique-t-elle pas aussi à notre époque? Les fausses religions, l’ignorance de la Bible, la corruption politique et le déshonneur, la guerre civile et la violence sont autant de caractéristiques de notre monde actuel. De nos jours, la «tolérance» est souvent prônée comme la vertu par excellence. La définition qu’en donne notre société rejoint cette phrase tirée du livre des Juges: chacun fait ce qui lui semble bon. Les personnes tolérantes réagissent généralement mal aux vérités bibliques, surtout lorsqu’il s’agit du péché.
Toutefois, ce problème ne se retrouve pas seulement à l’extérieur de l’Église. Les chrétiens sont, eux aussi, tentés d’adopter la vision du monde dominante de notre culture actuelle. Lorsque des péchés se banalisent dans notre société, il est facile pour les chrétiens de les tolérer. Beaucoup d’Églises ont cédé à la pression culturelle et ont abandonné certains enseignements éthiques pourtant clairement énoncés dans la Bible. De nombreux chrétiens n’ont pas le courage de résister face à ces tentations; d’autres manquent de discernement théologique pour détecter ces erreurs.
C’est justement dans ce type de contexte que les chrétiens sont appelés à briller. Ruth et Boaz nous montrent l’exemple. La noblesse et le courage de Ruth, la compassion et la droiture de Boaz nous éblouissent. Lorsque nous considérons leur comportement à l’époque des juges, nous sommes motivés à nous détourner des pratiques actuelles pour suivre Christ.
Extrait du livre Ruth pour toi de Tony Merida