La fiabilité des Évangiles est régulièrement remise en question parce que la liste des témoins de la résurrection diverge d’un récit à l’autre. Bauckham, au contraire, soutient que ces différences révèlent «le soin scrupuleux avec lequel les Évangiles présentent les femmes comme des témoins». Il suggère que les auteurs ont nommé les témoins oculaires qu’ils connaissaient personnellement. Cette position est particulièrement pertinente dans l’Évangile de Matthieu. Selon la loi juive, l’idéal était de faire témoigner trois personnes, mais plutôt que d’étoffer sa liste, Matthieu «se contente de mentionner comme témoins les deux femmes qu’il connaissait bien».
Les deux premiers témoins de la résurrection étaient des femmes. À cause de notre sensibilité moderne, nous pouvons facilement passer à côté de l’importance de cette information. Pourtant, dans la culture juive de l’époque, le témoignage des femmes n’était pas jugé crédible. Il est absolument impossible que les auteurs des Évangiles aient assigné le rôle de témoins principaux à des femmes s’ils avaient inventé leur histoire de toutes pièces. Cela équivaudrait de nos jours à faire reposer une revendication juridique essentielle sur le témoignage d’une poignée d’enfants. Ce préjugé culturel à l’encontre des femmes se manifeste dans la réaction des disciples masculins: «Celles qui dirent ces choses aux apôtres étaient Marie de Magdala, Jeanne, Marie, mère de Jacques, et les autres qui étaient avec elles. Ils prirent ces discours pour des rêveries, et ils ne crurent pas ces femmes» (Luc 24.10).
L’authenticité des Évangiles est encore confirmée par l’embarras des premiers dirigeants de l’Église face à ces événements. Tous les hommes qui se disaient disciples de Jésus l’ont abandonné. Pierre, l’un de ses amis les plus proches et un responsable clé au sein de l’Église primitive, va jusqu’à nier trois fois connaître Jésus. Les apôtres ont bien mauvaise presse dans les Évangiles! Ces détails auraient sûrement été passés sous silence si les auteurs des Évangiles n’avaient pas tenu à relater ce qui s’est effectivement passé. On n’aurait certainement pas inventé de tels détails! Qui voudrait être connu à jamais comme «Thomas l’incrédule»? Ou comme le disciple qui jure être prêt à suivre Jésus jusqu’à la mort avant de jurer ne pas le connaître quelques heures plus tard seulement?
N. T. Wright, un autre spécialiste éminent du Nouveau Testament et historien de l’Antiquité, s’est longuement penché sur la résurrection de Jésus. Il a attentivement examiné les contextes historique et culturel – y compris la gêne qu’aurait entraîné le fait que les premiers témoins étaient des femmes. Ses conclusions renversent nombre des arguments généralement utilisés pour discréditer la résurrection. Par exemple, certains suggèrent que Jésus s’est contenté de perdre conscience sur la croix, et non de mourir. Mais les soldats romains étaient experts en matière d’exécution. La crucifixion (le châtiment habituel pour les dirigeants de mouvements messianiques) était l’un de leurs outils préférés. De plus, Wright remarque que lorsque la crucifixion venait mettre fin à des mouvements messianiques contemporains, soit les disciples abandonnaient la cause et rentraient chez eux, soit ils se trouvaient un autre messie. On passait généralement le flambeau à un membre de la famille du leader ou à l’un de ses associés. Jacques, le frère de Jésus, aurait été un choix tout indiqué. Cependant, bien que Jacques ait été parmi les responsables de l’Église primitive, ni lui ni un autre apôtre n’a revendiqué le statut de Messie. Les disciples, au contraire, proclamaient que Jésus était ressuscité des morts. Nombre d’entre eux ont payé de leur vie pour cette conviction – ce qu’ils n’auraient certainement pas fait s’il ne s’agissait que d’un mensonge organisé.
Pour d’autres détracteurs, Jésus ne serait pas physiquement ressuscité, mais il aurait simplement continué d’exister dans le cœur de ses disciples. À la lumière du contexte juif, Wright rejette également cette idée car la résurrection a toujours signifié une nouvelle vie
incarnée après une période de mort. Au premier siècle, de nombreux Juifs croyaient que le peuple de Dieu ressusciterait au dernier jour. Mais l’idée qu’une personne puisse revenir à la vie, avant cette échéance, dans un corps ressuscité transformé, était entièrement inédite et inattendue.
De nos jours, la résurrection physique nous paraît invraisemblable. Comme l’explique Wright, nos ancêtres au premier siècle savaient eux aussi que ceux qui meurent restent morts. Alors que Jésus avertit ses disciples qu’il va mourir puis ressusciter, aucun d’entre eux ne le croit avant de le voir de ses propres yeux. Dans un autre épisode plutôt embarrassant, Thomas, un disciple de Jésus, refuse de croire en la résurrection de Jésus même après le témoignage oculaire de tous les autres disciples: il ne croit qu’en voyant Jésus en personne (Jean 20.24-29).
La résurrection nous semble aussi improbable qu’elle ne l’était pour Thomas. Pourtant, si Dieu existe – un Dieu à l’origine de l’univers tout entier –, alors la possibilité du miraculeux existe aussi. Celui qui a créé les lois de la nature peut tout à fait décider d’intervenir quand il le désire. Celui qui a créé la vie peut tout à fait rendre la vie aux morts.
Cet article est extrait du livre 12 raisons de ne plus croire au christianisme de Rebecca McLaughlin, pages 127 à 129.