GRÂCE ET VÉRITÉ
Il nous faut inclure la déclaration importante de l’apôtre Jean dans son évangile: « En effet, si la Loi nous a été donnée par Moïse, la grâce et la vérité sont venues par Jésus- Christ » (Jean 1: 17). Les lecteurs du Nouveau Testament savent que l’enseignement sur la loi et la grâce est un des sujets favoris de l’apôtre Paul. On le retrouve partout dans ses deux grandes épîtres, aux Romains et aux Galates et à d’autres endroits également. J’ai découvert que Jean, lui aussi, parle de la loi et de la grâce. Et ces vérités sont aussi fondamentales pour Jean que pour Paul.
Jean oppose autant la grâce et la loi que Paul, mais il lie la vérité avec la grâce. Il explique que la grâce est venue par Jésus-Christ, ainsi que la vérité. Cette association entre grâce et vérité dynamise ce qu’il veut dire.
Le mot « vérité » peut être compris de deux façons. Il est souvent utilisé pour qualifier la doctrine, le message de l’Évangile. Ailleurs, en particulier dans les écrits de Jean, il désigne la réalité, c’est-à-dire la correspondance avec les choses telles qu’elles sont. Utilisé dans ce sens, c’est l’un des termes favoris de Jean. Il souligne que ce n’est pas uniquement la grâce qui est venue avec Jésus-Christ à travers la croix, mais aussi la vérité. Si la croix de Jésus est la suprême révélation de la grâce, il en est de même pour la vérité – la vérité concernant Dieu et également la vérité nous concernant!
La vérité à notre sujet nous regarde droit dans les yeux, du haut de la croix. Si la mort en croix était un châtiment réservé aux criminels – c’était le cas sous la loi romaine –, si c’est notre place que Jésus a prise, quelle conclusion en tirons-nous? Nous ne sommes rien de moins qu’une bande de criminels! Voilà la vérité qui nous concerne tous, qui explique la place que le Seigneur a dû accepter pour nous sauver. Quelle grâce, dites-vous? Certes, mais aussi quelle vérité humiliante pour nous!
Lorsque nous admettons cette vérité, que nous sommes des criminels aux yeux de Dieu, c’est alors seulement que nous nous qualifions pour la grâce. Avec quelle adresse l’apôtre Jean n’équilibre-t-il pas son message! Si seule la grâce est venue par Jésus-Christ, alors le message pourrait paraître trop lénifiant ou sucré. Si c’est la grâce et la vérité, qui sont venues, alors rien ne nous sera épargné. Tout sera révélé. Mais avec la révélation, la surabondance de la grâce couvrira tous nos péchés.
Ainsi, alors que sa mort affiche mon péché,
Dans ses couleurs les plus noires,
Le mystère de la grâce est tel
Qu’il garantit aussi mon pardon.
Toutes les approches que Dieu emploie avec nous sont un mélange de grâce et de vérité. Il fera varier le mélange selon nos besoins du moment. Dans un cas nous pourrons nous sentir déprimés et découragés à cause de nos manquements et plus enclins que d’habitude à nous flageller. Dieu veillera alors à ce que le message nous parvienne avec une plus grande proportion de grâce: « Prends courage, mon enfant, tes péchés te sont pardonnés » (Mat 9: 2). À une autre occasion il se pourra que nous tolérions le péché, abusant de la grâce, faisant peut-être des compromis. Dans ce cas, le message que nous recevrons insistera plus lourdement sur la vérité, selon que Dieu le jugera bon.
Nos cœurs seront sondés et le péché révélé – à la seule fin de provoquer notre repentir –, pour que nous soyons qualifiés d’autant plus pour la grâce qui est offerte. Durant tout ce temps, l’accent principal sera mis sur la grâce: « Que votre parole soit toujours empreinte de la grâce de Dieu et pleine de saveur » (Col 4: 6). La grâce est l’élément de base, la vérité l’assaisonnement, modulés selon nos besoins quotidiens. À la fois dans notre relation les uns avec les autres et dans celle avec Dieu.
Je l’ai souligné, le mot « vérité » est un concept-clé des écrits de l’apôtre Jean. Il revient souvent dans ses écrits, avec chaque fois un accent particulier. Dans son Évangile, il écrit: « En effet, celui qui fait le mal déteste la lumière, et il se garde bien de venir à la lumière de peur que ses mauvaises actions ne soient révélées. Mais celui qui a une conduite conforme à la vérité vient à la lumière pour qu’on voie clairement que tout ce qu’il fait, il l’accomplit dans la communion avec Dieu » (Jean 3: 20-21).
Il est compréhensible que celui qui a fauté évite la lumière et veuille dissimuler ce qu’il a commis. L’intérêt de ce passage réside dans ce contraste: « Mais celui qui a une conduite conforme à la vérité ». On aurait pensé que l’opposition soit entre « celui qui fait le mal » et « celui qui pratique le bien ». Or, le texte ne dit pas cela, mais: « celui qui a une conduite conforme à la vérité ».
L’idée est la suivante: avant même d’essayer de faire du bien pour réparer le mal que nous avons commis, nous devons avoir « une conduite conforme à la vérité »! C’est-à-dire être strictement honnête avec nous-mêmes et avec les autres. Et nécessairement avec Dieu. Avant même de penser à faire quoi que ce soit pour compenser le mal que nous avons commis, nous devons admettre ce mal que nous avons fait, c’est-à-dire « pratiquer la vérité », être simplement honnête là-dessus.
Le contraire de faire le mal est donc de faire la vérité. C’est ce que Dieu veut que nous fassions. Nous n’aurons pas peur, alors, de venir à la lumière. Il deviendra manifeste que « nos œuvres sont faites en Dieu ». Que sont ces œuvres qui sont faites en Dieu? Être honnête au sujet du péché, c’est « prati- quer la vérité ». Ayant « une conduite conforme à la vérité », nous saurons que la grâce est là, et a pardonné la faute. Nous pourrons aller de l’avant pour faire le bien, et mettre les choses en ordre avec la force que Dieu donne. Avant de faire le bien, soyez assuré d’avoir « une conduite conforme à la vérité »!
GRÂCE ET REPENTANCE
L’auditeur réfléchi peut être perturbé, lorsqu’il entend la grâce prêchée ainsi de manière complète. Il peut craindre que cela puisse conduire à ce qui est parfois appelé « la grâce à bon marché ». Mais la grâce se défend elle-même. La grâce ne laisse jamais tomber le pécheur. D’un autre côté, elle ne le laisse pas non plus s’échapper! La grâce est une médaille à deux faces.
Bien que l’adjectif habituellement associé à la grâce soit « stupéfiant » (comme dans le cantique archi connu Amazing grace: « Grâce stupéfiante »), pour être qualifié pour la grâce, il vous faut admettre que vous avez tort et prendre votre place de pécheur. Rien n’est plus humiliant que cela. Certains souffrent parfois les affres de la mort pour confesser leurs torts. Alors qu’ils prétendaient avoir raison avant.
Rien n’est facile! La grâce exige cela à cause de son caractère même. Celui d’une Bonne nouvelle pour des rebelles. Vous devez confesser votre nature rebelle pour prétendre à la grâce. Seuls ceux qui confessent leur faute sont de vrais candidats à la grâce. C’est pour cela que la voie des œuvres est si populaire. Beaucoup veulent un chemin qui leur permette de s’en sortir, sans avoir à s’humilier. Mais « celui qui s’élève sera abaissé, et celui qui s’abaisse sera élevé » (Luc14: 11)… à chaque fois! C’est toujours comme cela que fonctionne la grâce.
De plus, elle donne tous les encouragements nécessaires pour se repentir – ce que la loi ne fait pas. Selon les termes de l’alliance du Sinaï, nul ne peut se permettre d’être dans son tort. Avoir tort au Sinaï, c’est être bon pour une volée de bois vert! C’est pourquoi nous ne cessons de nous justifier. Au Calvaire, les choses sont différentes. La miséricorde y est grande et la grâce ne coûte rien. Le pardon y est multiplié. Nous pouvons nous payer le luxe d’admettre que nous avons tort parce que nous sommes pardonnés et déclarés justes devant Dieu.
Une paix solide nous est accordée. Un ami prédicateur a énoncé cette vérité profonde: « Là où il n’y a pas de réveil, tout le monde a raison. Lorsque le réveil vient, c’est-à-dire lorsque Jésus vient, tout le monde a tort! ». Ceux qui confessent leurs torts sont déclarés justes devant Dieu, par le sang de son Fils, et ils le savent! Soyez-en certains, la repentance et le réveil ne viennent que par la redécouverte de la grâce.
GRÂCE ET SAINTETÉ
Je peux imaginer que mon lecteur réfléchi n’est toujours pas satisfait et qu’il se dit: Est-ce que tout cela ne pourrait pas conduire à l’irresponsabilité des chrétiens, s’ils suivent le conseil de Paul de « ne pas laisser sans effet la grâce que vous avez reçue de Dieu »? Certes, cela pourrait être le cas. Certains abusent de la grâce. C’est un risque calculé que Dieu prend. S’il rendait l’obtention de la grâce plus difficile et introduisait de nombreuses conditions supplémentaires – même si cela s’avérait salutaire pour plusieurs, cela en désespérerait d’autres, peut-être la majorité. Ils auraient l’impression que cela dépasse leurs maigres ressources. Dieu a donc décidé de laisser la grâce être une grâce, de ne lui associer aucune condition. Si la grâce ne produit pas la sainteté, Il n’a pas d’autre recours. Mais elle produit bel et bien la sainteté.
Celui à qui la grâce pardonne beaucoup, aime beaucoup. Celui qui aime beaucoup ne peut pas en faire assez pour celui qui lui a tant pardonné… mais pas selon l’exigence de la loi. C’est ce que Paul voulait dire lorsqu’il écrivait: « une foi qui se traduit par des actes inspirés par l’amour » (Gal 5: 6). Il avait affirmé que la justification du pécheur devant Dieu ne se fait pas par les œuvres, mais par la foi. Il savait que certains diraient: « Ça, c’est laisser les gens s’en sortir à trop bon compte! Plus personne ne se donnera du mal pour faire de bonnes œuvres! ». Paul répond en disant: « N’ayez pas peur, ceux qui sont justifiés par la foi œuvreront tout à fait correctement. La foi dans la grâce produit l’amour. L’amour ne connaît pas de limites à ce qu’il fait pour le Bien-aimé ».
Si nous travaillons peu pour le Seigneur, c’est parce que nous l’aimons peu. Si nous l’aimons peu, c’est parce qu’il nous a été peu pardonné. S’il nous a été peu pardonné, c’est parce que nous nous sommes peu repentis. Autant s’y mettre tout de suite, donc! C’est pourquoi Paul précise: « nous vous invitons à ne pas laisser sans effet la grâce que vous avez reçue de Dieu ». Nous, à qui il a été beaucoup pardonné, lorsque nous comprenons que nous avons reçu la grâce de Dieu en vain, alors, nous nous repentons et obtenons cette grâce aussitôt.
La vérité est que la grâce produit des résultats: de l’amour pour Dieu, de la sainteté et un esprit de service. La loi ou une simple conscience de ses obligations légales ne produit jamais de pareils résultats! En observant les résultats produits par le message de la grâce dans la vie des autres, la seule chose que vous trouverez à dire est: « Dieu soit loué, ça marche! ».
Élisée a refusé d’accepter un présent du lépreux Naaman en échange de sa guérison. Voilà pourtant la grâce en action. Résultat? Naaman dit: « dorénavant ton serviteur ne veut plus offrir ni holocauste ni sacrifice de communion à d’autre dieu qu’à l’Éternel » (2 Rois 5: 17) . De la part d’un général païen, jusque-là ignorant de qui était le Dieu d’Israël, c’est certainement une des grandes conversions de l’Ancien Testament! Élisée n’a pas accepté de cadeau, mais il a accueilli un homme! Une autre victoire de la grâce!
GRÂCE À LA PLACE DE LA GRÂCE
L’apôtre Jean a écrit: « Et nous avons tous reçu de sa plénitude, et grâce à la place de la grâce (Jean 1: 16) » (en grec littéralement) et non, comme on aurait pu s’y attendre, grâce à la place du péché. Mais grâce à la place de la grâce.
Voici une illustration: nous sommes debout, au bord d’une rivière. Nous regardons le courant à nos pieds. C’est une merveilleuse vision. Nous pouvons même voir des poissons. Nous aimerions qu’elle persiste. Mais elle ne tarde pas à se modifier. L’eau a disparu… pour être remplacée… par une eau renouvelée, elle aussi pleine de beauté. C’est de l’eau à la place de l’eau.
Il en est ainsi de la grâce de Dieu. Pour celui qui la reçoit, ce n’est pas une expérience unique, qui doit être conservée précieusement et qui, en cas de disparition, doit être reconquise par tous les moyens. C’est plutôt un fleuve qui coule tranquillement. Ce qui veut dire qu’il est possible de se payer le luxe de laisser s’en aller sa première expérience. Car il y en aura encore beaucoup d’autres de la même source d’où a jailli la première. C’est la grâce à la place de la grâce!
Lorsque nous avons épuisé notre stock d’endurance,
Lorsque notre force a failli avant le milieu du jour,
Lorsque nous avons atteint la fin des ressources que nous avions amassées,
Les dons sans fin de notre Père céleste n’ont fait que commencer.
Son amour n’a pas de limites, Sa grâce pas de mesure,
Sa puissance pas de plafond connu des hommes,
Car, de sa richesse infinie en Jésus,
Il donne et donne et donne encore.
Article extrait du livre Bonne nouvelle pour des rebelles, par Roy Hession