Les slogans ont le vent en poupe. Que ce soit sur Facebook, Twitter ou encore Instagram, ils sont omniprésents. C’est à qui sortira la meilleure punchline ou dégotera la citation la plus inspirante. Celle qui aura le plus d’impact avec le moins de mots possible. Il faut que ça claque! Et tant pis si parfois cela doit se faire au détriment du sens. C’est un dommage collatéral. La priorité est à l’effet suscité. On cherche la phrase percutante plus que le mot vrai.
Est-ce le symptôme d’une société préférant la forme au fond? Probablement. Exacerbée à l’heure des réseaux sociaux, cette situation ne date toutefois pas d’aujourd’hui. C.S. Lewis mettait les chrétiens en garde déjà au milieu du 19e siècle, dans son excellent ouvrage Tactique du diable: «Les slogans, et non le raisonnement, seront tes meilleurs alliés pour l’éloigner de l’Église», conseille le démon expérimenté à son apprenti afin de mettre en péril la foi d’un jeune croyant.
Que l’être humain d’aujourd’hui pense, réfléchisse et s’interroge, voilà ce qui inquiète tant Satan d’après l’auteur du Monde de Narnia. Dès lors, est-il bien raisonnable de répéter à l’envi des slogans dont on ne prend même plus la peine de questionner le sens? Est-ce correct de ressasser machinalement les mêmes expressions sans connaître leur véritable signification? Juste parce qu’elles sonnent bien…
Les chrétiens de Bérée «examinaient chaque jour les Écritures pour voir si ce qu’on leur disait était exact». Suivant leur exemple, nous aurions tout intérêt à décortiquer, à la lumière de la parole de Dieu, les slogans que nous entendons (ou qu’il nous arrive de prononcer). Ce défi, nous avons essayé d’en poser quelques jalons au travers de cet ouvrage collectif.
Nous avons ainsi réuni treize théologiens et théologiennes talentueux, issus de différentes dénominations évangéliques, pour nous aider à prendre du recul sur certaines expressions qui circulent dans nos Églises. Chacun d’entre eux a eu pour mission d’en décrypter une dont le sens est discutable. La plupart de ces phrases vous seront sûrement familières.
Quel est le but de cette démarche? Nous aider à démêler le vrai du faux dans ces slogans. Mais aussi soulever les enjeux théologiques qu’ils véhiculent. Je remercie ici les différents auteurs de s’être prêtés à cet exercice délicat. A chacun ensuite d’examiner toute chose et de retenir ce qui lui semble bon, comme dirait l’apôtre Paul.
Ma prière est que cet ouvrage contribue à votre édification. Qu’il vous encourage à toujours plus de cohérence entre votre lecture des Écritures et ce que vous en faites – en paroles ou en actes. Il ne s’agit pas d’accuser quiconque emploie ces expressions. Avec humilité, reconnaissons qu’il nous est sûrement déjà arrivé à tous de prononcer l’une ou l’autre de ces phrases à un moment de notre vie. La liste retenue ici n’est pas non plus exhaustive.
Cet ouvrage ne vise donc pas à nous rabaisser, mais bien à nous élever. D’ailleurs, les «phrases chocs» ont parfois du bon et la Bible n’en est pas dépourvue. Le livre des Proverbes recueille ainsi de courtes maximes pleines de sagesse. Ce qui pose surtout problème dans notre cas, c’est quand la recherche de la belle formule ou la répétition mécanique éclipsent l’exigence de vérité.
La réflexion théologique est là pour nous aider à prendre du recul et pour nous remettre sur les bons rails. De fait, ce livre est aussi une occasion de montrer que la théologie ne se réduit pas à une discipline théorique, réservée à des hautes sphères intellectuelles. Elle rejoint notre quotidien et peut avoir des incidences concrètes sur nos habitudes.
En nous interrogeant sur les expressions qui ont cours dans nos Églises, nous ne jouons pas sur des mots. Nous voulons rester fidèles à la parole de Dieu. Rechercher la précision dans ce que nous disons, c’est aussi une façon d’honorer Dieu et d’éviter à notre prochain des confusions dommageables. Autant de belles raisons pour surmonter ce défi qui nous est lancé: «Parlons mieux»!
Introduction du livre Parlons mieux!, paru en février 2021